jeudi 20 novembre 2008

NOSTALGERIE de Christian Missud

Souk-Ahras, mais à tout prendre, qu’est-ce ?

Amis, vous connaissez sans doute la tirade qui commence ainsi :
« Un baiser, mais à tout prendre qu’est-ce ?.... »
Souk-Ahras, braves gens, mais à tout prendre qu’est-ce ?...
J’aurais pu mes amis, parodiant Rostand, poursuivre de la sorte un poème joli.
J’ai préférer pourtant, user plus simplement d’une prose rythmée.

Souk-Ahras, mes amis, mais à tout prendre qu’est-ce ?...
Pour tous ces anonymes qui ont tant soit peu lu,
Pour tous les inconnus qui n’ont pas eu la chance,
De sourire à la vie, au pied de L’OLIVIER,
Ce n’est qu’un nom antique, une place : THAGASTE.
Un lieu de Numidie aux contours imprécis
Ou naquit un certain Aurèle Augustinus,
Devenu notre Saint, docte père de l’Eglise.

Souk-Ahras, mes amis, mais à tout prendre qu’est-ce ?...
Pour les braves soldats qui ont crapahuté,
Qui ont connu la peur et la joie du succès,
C’est le lieu du combat terrible, meurtrier.
C’est le serment trahi, c’est l’honneur bafoué.

Pour l’insouciant touriste qui passe sans rien voir,
Il n’y a qu’une rue : La rue VICTOR HUGO
Qui du fier MONUMENT, comme une tour Eiffel,
S’achève auprès du KIOSQUE comme un arc de triomphe.
Mais pour nous mes amis, ce Souk-Ahras, Qu’est-ce ?

Pour nous tous, mes amis, citons dans le désordre :
La MAIRIE et l’EGLISE ou la SALLE DES FETES,
Les ECOLES ou encore le GRILLON :
SYNAGOGUE ou MOSQUEE, le THEATRE, la GARE…

Mais pour chacun de nous, et comme un microscope,
C’est un détail infime que chacun porte en soi :
Un balcon ouvragé orné de géraniums
Ou l’on dort à demi sous une chaise-longue
Avec, à sa porté, une blanche anisette,
C’est un carré de prés où deux ou trois copains
Fument en se cachant la même cigarette ;
Ou la course éperdue de vielles bicyclettes
Jusqu'à la source d’eau si franche et pétillante,
C’est la douce tiédeur d’une terrasse obscure
où l’on connaît, l’amour, pour la première fois,
où l’on se sent vainqueur malgré ses maladresses.
C’est le creux d’une porte, (pas n’importe laquelle)
Où l’on s’embrasse sans fin, où l’on s’embrasse sans frein.
C’est la bordure de buis que mouille le jet d’eau,
C’est le bambou coupé quand le garde est ailleurs
C’est celle qu’on épie à travers les carreaux
Et ce sont les jeux fous sur les bords du bonheur…

Mais Souk-Ahras, aussi n’est-ce pas mes amis ?...
Celui que nous gardons au fond de notre cœur,
Ce sont tous ces aînés que nous avons perdus,
Que nous avons aimés, que nous ne verrons plus,
Que nous n’entendrons plus qu’au fond de nos mémoires.

Et puisque à notre tour, nous devenons « ancêtres »
Souhaitons que nos fils et nos filles aussi,
Qu’ils soient de notre sang ou bien de notre esprit
Se souviennent à jamais qu’ils sont de SOUK-AHRAS.
Qu’ils ne ressemblent pas à ces oueds stériles
Qui nés de nulle part n’atteignent pas la mer:
Car la rivière se perd qui néglige sa source…

Christian MISSUD-CARDINALE


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1 commentaire:

Anonyme a dit…

Comme le pain ne peut "oublier" ses composants, Nous ne risquons pas d'effacer de notre mémoire tout ce dont nous sommes pétris. Nous portons en nous un vécu "indélébile" comme vous le dites si bien, notre mémoire nous parle sans même avoir besoin de la solliciter. Nos enfants n'auront pas ce vécu, ils n'en seront que les dépositaires.